PARCOURS

Une biographie raconte des choses de façon organisée, dans un ordre linéaire et factuel, or, le terme « factuel » me fait réagir instantanément, bailler plus exactement. Quelque chose chez moi résiste à la mise à plat de l’expérience, à voire défiler le vécu comme s’il s’agissait d’une liste de courses. Puis j’ai du mal avec les ratés que je ne vois pas apparaître dans cette drôle de liste. Mon parcours s’est construit à travers et grâce aux rencontres que j’ai pu faire, ceux hasardeux et ceux que j’ai provoqués, guidée par ma curiosité plutôt infatigable. La chance y met toujours du sien aussi (ou pas du tout) mais ma boussole a suivi ces deux facteurs : l’humain et le désir d’en savoir plus sur quelque chose. C’est cela que le curriculum-vitae qui suit ne dit pas, toute la profondeur du vécu, d’une rencontre, la richesse que l’«autre» a pu avoir à mes yeux. Il se trouve que j’adore parler des personnes qui ont été importantes pour moi, pour chacune d’entre elles j’ai le récit intérieur du tissage qui me lie à elles, j’imagine un peu comme tout le monde. En tout cas … Robert Pomper a été le premier danseur et artiste que j’ai rencontré, il était français installé à Milan et avait fait carrière surtout en Israël au moment où la Batsheva Dance Company avait intégré le répertoire de Martha Graham. La première fois que je l’ai vu il portait un chapeau en paille et fumait sa cigarette, il était assis un peu en hauteur, les jambes ballantes et rigolait avec des gens. Quelque chose d’intriguant émanait de sa figure. Son regard était particulier du fait que ses yeux étaient plutôt écartés, cela lui élargissait tout le visage et traduisait bien l’ouverture de son esprit, de sa pensée, de sa façon d’être. Il y avait quelque chose d’insaisissable chez lui, qui échappait à toute volonté d’emprise, insaisissable aussi pour lui-même. C’était un professeur incroyable parce que c’était l’artiste qui enseignait. Il créait tout le temps, le suivre dans la danse c’était égale à surfer des vagues. Sa versatilité et sa fantaisie dans le mouvement, que j’ai retrouvé par la suite chez Felix Ruckert, ont été de grands maîtres pour moi, j’ai toujours pensé que c’était grâce lui que mon corps avait absorbé un certain sens du mouvement, un désir d’élan et l’appétit d’investir l’espace. Sa démarche était similaire, on aurait dit qu’elle partait dans plusieurs direction simultanément, voilà Robert c’était ça, un homme à la chevelure indisciplinée qui aimait les gens et la vie et pour qui maintenir un seul cap était bien trop réducteur. Il a continué à m’intimider malgré l’amitié que nous avions lié avec le temps. J’arrivais à Milan peu avant ce geste fou, inconscient, désespéré, tragique qui lui a fit enjamber la fenêtre de son appartement et y perdre l’équilibre à jamais. Pourquoi parler de lui ? D’abord parce que c’est lui qui est apparu pendant que j’écrivais (merci Robert pour vibrer toujours quelque part dans ma kinésphère !), puis parce que je pense que c’est la personne qui a ouvert les frontières à ma danse, comme à bien d’autres parmi ses élèves, il lui a offert la dimension et la projection nécessaire à son envol. Il disait que ma façon de bouger dégageait quelque chose de très sympathique, j’avais aimé ce compliment parce que dépourvu de séduction, je pouvais donc y croire. Ce sont des personnes comme Robert, inspirantes et passionnées par leur recherche qui ont jalonné mon chemin, ça n’a été que ça, suivre les dérives de ma curiosité et de ma fascination pour le mouvement. Cela explique le schéma en arborescence de mon trajet, touchant aux diverses aspects et sphères du geste dansé, sans m’adonner à une seule dimension et dont l’écriture est la dernière.
« Sois plus curieux qu’ambitieux » cette phrase que Steve Paxton suggère aux praticien.nes du contact improvisation comme ligne directrice de leur danse résonne en moi et quelque part me rassure aussi.

Marika Rizzi

est née à Milan, Italie et réside à Paris depuis 1992.

Formée d’abord à la danse classique, elle suivra par la suite l’enseignement de Robert José Pomper (Batsheva Danse Compagnie) en danse moderne. En 1991 elle passe du temps à New York ou elle se familiarise à la technique de Martha Graham ainsi que à celle de Horton et fréquente les ateliers chorégraphiques de la compagnie Paul Taylor.

Résidant à Paris depuis 1992, elle approfondie la technique contemporaine et s’oriente vers les pratiques de composition instantanée et de contact improvisation. Dans son parcours de recherche elle rencontre l’enseignement de Kirstie Simson avec qui elle a performé à plusieurs reprises, Steve Paxton à l’occasion de la fabrication du DVD «Material for the Spine», Nancy Starck Smith et Mike Vargas, Lisa Nelson dans son travail avec la vidéo et dans la pratique du Tuning Score, Simone Forti, Deborah Hay, Julyen Hamilton, Andrew Morrish, Vera Orlock (BMC).

ACTIVITÉS CHORÉGRAPHIQUES

Membre de la cie Felix Ruckert – Berlin- entre 1995 et 2005, elle participe aux créations et aux tournées de: «Hautnah» – solo pour un seul spectateur: Berlin ’95, Bruxelles ’96, Montréal ’99 – «Krapplack» ’98, «Projet Chorégraphique» ’99, «Ring» ’99, «Deluxe Joy Pilote» 2000; «Secret Service» 2001.

En 2003 elle co-fonde le collectif NAPOLI 11 au sein du quel elle intervient avec des projets personnels, artistiques et pédagogiques dans la ville de Naples pendant quelques années.

En Juillet 2006 elle est invitée par Kirstie Simson à participer à une rencontre réunissant des danseurs impliqués dans l’improvisation et dans la danse contact dans le but de questionner cette forme de représentation et la place qu’elle occupe (ou pas) dans l’univers du spectacle vivant. Cette rencontre, a été filmée et a fait l’objet d’un film sur l’improvisation et le contact.

De 2004 à 2008 elle co-organise la mise en place du projet de l’«Underscore», pratique de danse contact de Nancy Starck Smith, soutenu par le C.N.D. de Pantin.

En 2007/08 elle rejoint la cie Odile Duboc (CCN Franche Comté – Belfort) dans les tournées de «Rien ne laisse présager de l’état de l’eau».

En Juin 2010 et Novembre 2011 elle est invitée par Simon Ellis à intervenir à l’université Roehampton de Londres. Ensemble ils créent le duo «Desire Lines» sélectionné à Londres à The Place Prize.

En 2011 elle rencontre Deborah Hay qui l’invite à participer au projet de transmission de solo SPCP (Solo Performance Commissionning Project). Elle fera partie de la dernière session du project en 2012 témoignée dans le film documentaire «  Turn Your F^*ing Head  » et elle présente son adaptation du solo «Dynamic – Measuring Silence» en 2013.

En Mars 2013 elle est invitée par le Département d’Ingénierie Mécanique de l’Université de Urbana- Illinois pour développer un projet de recherche au croisement de la science et de la danse, en collaboration avec Kirstie Simson et Simon Ellis de l’Université de Coventry, Londres.

Entre 2014 et 2015 elle a collaboré avec Laurent Goldring sur le projet «Cesser d’être un», dispositif chorégraphique soutenu par la DRAC IDF, Ministère de la Culture. Le projet a été présenté à June Events en 2016.

Depuis Septembre 2019 elle est accueillie au Centre d’Art Contemporain Les Moulins de Paillard dans le cadre d’une Résidence Territoriale dans les Pays de la Loire. L’accueil en résidence durera trois années. Elle y proposera «  Les Permanences d’Artiste  » tous les derniers dimanche du mois dans une de salles d’exposition. «  Soli d’Air  », projet avec les habitant des communes limitrophes. «  Entre le Chien et l’Anarchie  », festival de pratiques d’improvisation et de composition instantanée.

En France elle a aussi collaboré avec les chorégraphes : Blanca Li, Martine Harmel, Guillaume Marie, Vidal Bini, Valeria Apicella, Eva Klimackova. Elle entretient une pratique de l’improvisation et du Tuning Score de L. Nelson avec différents groupes de recherche.

Elle enseigne régulièrement à Paris (Ménagerie de Verre, Micadanses, Canaldanse, CN D).

En 2016 elle intervient au sein de la formation D.U. de Paris 8 «Techniques du corps et monde du soin». En 2019 (prévu également en 2020) elle intervient dans un projet d’enseignement des habilités relationnelles auprès d’étudiants de l’Institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de l’hôpital Henri MONDOR. En partenariat avec La Briqueterie CDCN du Val de Marne et le Centre de la Formation et du Développement des Compétences (CFDC) de l’ Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP).

Elle est intervenue plusieurs fois dans le milieu scolaire au sein du programme pédagogique des Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis et dans celui du Manège de Reims. Elle a également développé des projets avec des publics fragiles, notamment avec des jeunes non-valides (termes employé par les parents des jeunes).
En 2015 elle est assistante du chorégraphe italien Virgilio Sieni pour son projet «  Madri e Figli – Padri e Figli  » présenté au festival des Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis.

PROJETS

Quello che si é. 2004 – Objet d. 2005 – 3Avril58. 2006 – Workaholic, dedicated to be. 2008 – Les Pas d’Avant. 2009 – Soli d’Air. 2010 – J’ai trouvé la verticale par mes sinus – Élodie. 2011 – « DYNAMIC » Measuring Silence. 2013 – Cesser d’être un. 2014 et 2015 co-crée avec le plasticien L. Goldring. Ce dispositif chorégraphique a été soutenu par la Drac IDF. – Se résoudre dans le vide. 2021, soutenu par la Drac Pays de la Loire. Pratiquer l’Inconnu-Inventer le Présent (PI-IP) 2022/23 (en cours).

FILM et THÉÂTRE

En Novembre 2018 elle a tourné dans le dernier long métrage de Damien Manivel « Les enfants d’Isadora » autour du solo « La Mère » d’Isadora Duncan. Le film a été primé au festival de Locarno 2019 avec le Pardo de la meilleure mise-en-scène, et au festival de Murcia, Espagne, avec le prix du meilleur long-métrage.
Elle participe aux courts métrages : «C’est Merveilleux» 2000 et «Il faut aimer son prochain, les autres sont trop loin» 2006, «Si c’est une île c’est la Sicile» 2015, d’Arnold Pasquier. «Seafood» 2004 de Frank Richard.
Dans des projets de théâtre avec Arnold Pasquier «C’est merveilleux», avec Clyde Chabot «Hamlet machine» et avec Sergio Longobardi «Demande d’asile ».

ÉTUDES EN DANSE

En 2013/14 elle a suivi la formation D.U. à Paris 8 « Techniques du corps et monde du soin », sous la direction d’Isabelle Ginot. En 2017 elle obtient le diplôme du niveau Master 2 au département de danse de Paris 8, sa recherche intitulée Sentir le Dire – Dire le Sentir se penchait sur les pratiques dansées de Kirstie Simson et de Deborah Hay à la lumière de leur terminologie. Le travail sous la direction d’Isabelle Ginot et Myrto Katsiki, a reçu la mention « très bien ».

COLLOQUES

« Rizhomes » au CIRRAS (Centre International de Réflexion et de Recherche sur les Arts du Spectacle) Paris 2018.

« Mettre en mot, mettre en signe l’expérience dansée » Université de Nice, 2018.

« You come, we’ll show you what we do », Rome 2018.

« L‘exercice en art » Université de Lille, 2019.

ARTICLES

Depuis l’automne 2017 elle écrit des recensions pour le site Ma Culture. Elle a publié dans la revue Funambule de département de danse de Paris 8, dans la revue en ligne de l’association des Chercheurs en Danse (aCD) ainsi que dans le journal de l’association pour la danse contemporaine (ADC) de Genève. En  2020 elle a mené des entretiens avec des artistes destinés aux feuilles de salles pour les festivals Ardanthé et June Events, ainsi que pour le festival Trajectoires de Nantes (par le biais de Ma Culture).

En suivant sa curiosité et son profond  intérêt pour le mouvement, sa relation à la danse s’exprime aujourd’hui de façons différentes. Celle-ci s’est développée en arborescence et touche aux diverses sphères en lien avec le geste. Elle défend la notion de « recherche en mouvement » sur laquelle son travail chorégraphique se fonde : partir de la pratique pour laisser émerger des matières corporelles et rejoindre la théorie à partir des savoirs spécifiques au geste et à la danse. Le travail d’écriture du mémoire pour le Master 2 a modifié sa relation au geste et au mouvement dont elle expérimente et interroge désormais une certaine forme d’«oralité».

ENTRETIENS aCD et ADC Genève

Journal de l’association des chercheurs en danse #7 : Mémoires de l’oeuvre en danse
La Mémoire face à l’absence de l’oeuvre
Entretien avec Bruno Danjoux, Stéphanie Ganachaud et Françoise Rognerud autour de l’oeuvre d’Odile Duboc.
https://journals.openedition.org/danse/2768

 

Journal de l’association pour la danse contemporaine # 77 : Art, Écologie et Transition
Je suis prêt à renoncer à tout !
Entretien avec Jérôme Bel (P.18)
https://pavillon-adc.ch/wp-content/uploads/2019/12/JADC_77_2019_DoublePages.pdf

 

AUTRES ACTIVITÉS

Praticienne de Shiatsu selon l’enseignement de Maître Tukuda – technique énergétique Japonaise – depuis ’99, elle est formée également à la pharmacopée chinoise.
En Mars 2019 elle intervient dans le centre hospitalier St. Paul d’Addis Ababa, Éthiopie, en transmettant des gestes de Shiatsu visant à soulager les douleurs lors de l’accouchement. Dans le même cadre elle est intervenue également dans le département de pédiatrie et auprès des bébés qui étaient hospitalisés.